Le drame de la maltraitance

Appartement 24, de Gaëlle Guernalec-Levy

Un livre choc sur l'engrenage de la violence et l'indifférence forcée des témoins, aveugles volontaires à tout ce qui se passe ailleurs que chez eux, « chez les autres »... A travers un récit criant de réalisme, l'auteur transforme son lecteur en un spectateur muet qui assiste, impuissant, à la maltraitance d'un enfant. Impossible à la lecture de ce livre de ne pas se comparer à la sympathique voisine du dessous qui entend bien, parfois, quelques bruits derrière la musique trop forte de son voisin, mais qui préfère croire que « ce n'était rien ». Impossible aussi de ne pas contenir son indignation devant une assistance sociale débordée, submergée de dossiers à traiter aussi urgents que sordides. Très loin du voyeurisme intrusif qui pourrait caractériser un roman de ce type, l'histoire nous plonge petit à petit dans une atmosphère oppressante, et l'on devine la violence plus que l'on n'y assiste. L'auteur dénonce, certes, un système loin d'être parfait (peut-il jamais l'être ?), mais condamne surtout le silence des autres, les voisins, les parents et tous ceux qui ferment les yeux sur le doute... En refermant le livre, on pense à ce sentiment d'auto-persuasion qui nous fait si facilement penser que « tout va bien » ou que « ça ne nous regarde pas ». Gaëlle Guernalec-Levy nous dit « non » : la souffrance d'un enfant nous concerne tous.

Article paru dans le journal libération ici